De Paris-Strasbourg à Paris-Colmar : histoire de la plus mythique des épreuves de marche

Mercredi 28 juillet 1926. A la Une du quotidien du soir Le Petit Parisien, une information éclipse l’arrestation de l’industriel Alexandre Stavisky dont les carabistouilles financières enflamment pourtant la France depuis des semaines. Mais Stavisky et son affaire ne font pas le poids face aux 63 athlètes qui se sont élancés l’après-midi-même à 13 heures de la place de La République à Paris pour une course mythique avant même sa première édition : Paris-Strasbourg à la marche. Ces hommes sont, dit le quotidien qui parraine l’épreuve, « les 63 meilleurs pédestrians d’Europe ». Ces marcheurs de grands fonds ont été sélectionnés par le comité d’organisation de la course, composé des officiels de la Fédération Française de Marche, de membres de la Rédaction du Petit Parisien, partenaire-titre de la course, et de l’inventeur de l’épreuve, l’athlète Emile Anthoine.

Ce n’est pas seulement un défi sportif que le marcheur parisien (qui avait fait inscrire l’épreuve des 50 km de marche aux J.O. de Los Angeles en 1932), a voulu créer avec ce Paris-Strasbourg : c’est un événement patriotique. Anthoine est un ancien combattant de 14-18. Et la victoire sur l’Allemagne le 11 novembre 1918 a marqué le retour de l’Alsace et la Lorraine à la France qui en avait été amputée lors de la défaite de 1870. Marcher de Paris à Strasbourg, capitale de l’Alsace, est donc symbolique. Qui plus est en compétition, sur un parcours de 505km, à la faveur d’un exploit qualifié de surhumain par l’Académie de Médecine. Surhumain, mais pas impossible. On le sait depuis 1892 quand un autre quotidien, Le Petit Journal, a organisé une épreuve de marche athlétique de Paris à Belfort, sur une distance équivalente (496km). L’initiative était elle-aussi patriotique : il fallait prouver au peuple de France (et à quelques autres…), que le pays comptait une génération de solides athlètes, conquérants, audacieux, durs au mal. Et que la défaite de 1870 était un lointain souvenir. 850 marcheurs s’étaient alignés au départ (les inscriptions étaient libres). 350 avaient rallié l’arrivée. Le vainqueur, Constant Ramogé, avait coupé le ruban de la ligne d’arrivée un peu plus de 100 heures après le départ.

Bien que ce premier Paris-Strasbourg soit disputé au plus fort de l’été, les marcheurs vont mettre quatre jours et trois nuits pour boucler le parcours. Le vainqueur est un Suisse, Jean Linder.

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Le Paris-Colmar en bref  :
. Créé en 1926 ; 
. Changements d’itinéraires et de nom : d’abord Paris-Strasbourg (1926-1980), devient Paris-Colmar en 1981, puis Paris-Alsace depuis 2015 ;
. 3 jours et 3 nuits non-stop, soit entre 65 et 80 heures de marche ;
. 2 arrêts obligatoires pour tous : 3 heures après 230km + 1 heure après 440km  ; 
. Epreuve féminine aussi depuis 1989 : le même itinéraire mais départ de Châlons-en-Champagne pour Colmar, soit 360km. 2 arrêts obligatoires : de 2 heures puis de 1 heure.
. Marche athlétique à une vitesse de 8 à 9 km/h.